Dans une photographie de nu, le jeu du désir est orienté : le photographe, et à travers lui le spectateur désire, la femme est désirée. La situation est bloquée dans une double passivité. Le désir du photographe est limité par l'objectif, la femme est soumise à l'image que l'on souhaite d'elle. À travers son modèle, le photographe ne met en scène que son propre désir et pour mieux se protéger il rend le spectateur complice de par leur position voyeuse commune.

Je veux une femme désirante plutôt qu'une femme désirée. De passive elle doit devenir active. Ce passage s'effectue en rompant la barrière dressée entre le photographe et le modèle : pour que le désir s'exprime il lui faut un objet, le modèle ne peut désirer sans personne en face de lui. Pour que le désir vive, il faut un échange, il ne faut pas qu'il reste dans une situation figée. De mis en scène, le désir est mis en jeu.

Prises de l'intérieur, les photos participent aussi au jeu. L'appareil est acteur autant que témoin. Et sa position de témoin est mise à mal par sa participation active. Cette disposition entraîne une mise en danger de chacun : le modèle doit à la fois affronter directement le désir qu'elle provoque et y répondre ; le photographe doit assumer son désir seul et au grand jour ; le spectateur se retrouve seul voyeur de l'histoire sans photographe alibi.